« Quand on veut manipuler la jeunesse, soit on la retourne contre soi-même soit on l’a à ses côtés »

Un an après la création du PRET, le parti a-t-il pu s’imposer sur le plan national ?

Merci monsieur le directeur de publication de l’opportunité que  vous nous donnez pour présenter de manière assez synoptique, la situation du PRET, et de faire un bilan d’étape avec vous. Comment nous nous imposons sur le plan national ? Nous affirmons  d’abord que la loi nous  fait obligation d’être visible dans 12 régions sur les 23. Nous le sommes en 14 régions dans lesquelles nous avons installé nos sections provinciales, départementales et certaines communales. C’est dire que nous avons rempli l’une des conditions, en principe disqualifiantes, qu’impose l’ordonnance 20, portant statut des partis politiques. Nous animons l’actualité du parti  politique et donnons notre avis sur la marche pacifique de notre pays en ce moment.

Comment appréciez-vous la désignation des membres du Cadre National de Dialogue Politique ?

Dans la flamme de l’action, nous avons dit au président de la république, à la sortie de notre réunion, que l’équipe qu’il avait imposée, nous autres l’avons qualifiée de filouterie politique. Parce que les partis de l’opposition, la vraie, n’ont pas eu la chance de pouvoir désigner leurs  représentants. Une liste a été fabriquée à la va-vite et on a pris des gens que nous n’avons pas désignés. Il s’agit en réalité, d’un enjeu, parce que la présence au CNDP ne doit pas s’apprécier à l’aune des ressources qu’on doit en tirer, mais plutôt en termes de préparation des dispositions à permettre d’aller à un combat sérieux, et gagner des espaces politiques. Vous avez connaissance des lois qui sont exclusives, notamment le code électoral qui a des dispositions tendancieuses à défavoriser certains jeunes partis politiques comme le nôtre.  

Il est vrai qu’en venant dans cette mare à requins, nous savions que tous les coups sont permis mais nous avions cru que les gens pouvaient être  animés de cette volonté à considérer que les choses soient faites dans l’équité et l’équilibre. Bref, aller au CNDP, ce n’est pas pour prendre 500 000 Fcfa, mais c’est d’abord pour travailler. Lorsqu’une partie de l’opposition s’organise pour écarter une autre ou y aller contre l’avis de la majorité de l’opposition, nous ne nous y reconnaissions pas. En dépit de cela, nous nous sommes dit qu’après tout, ce sont des tchadiens. C’est pour une année ou pour un mandat initialement prévu pour six mois. Ce qui est sérieux et urgent, c’est de mobiliser toute l’opposition démocratique, la vraie j’entends dire, c’est normalement d’envoyer des gens  qui ont un certain profil donné pour travailler.

Le tout n’est pas d’aller pour simplement émarger sur une feuille en fin de mois, comme pour un emploi salarié. Ça n’a pas du tout été perçu comme tel. Comme il s’agit d’aller aux élections, quand bien même que nous doutons du sérieux de l’organisation puisque nous sommes en saison des pluies, la mobilité est réduite et qu’aucune opération devant commencer en aval n’a pu l’être, je fais allusion au nettoyage du fichier électoral et de sa mise à jour et tout ce qui doit s’en suivre, il faut qu’ils se mettent maintenant  au travail tout en sachant que nous les observons.

Que dites-vous de la contestation du sultanat du Ouaddaï ?

Le texte portant statut des chefferies traditionnelles est on ne peut plus clair. On ne peut pas imposer quelqu’un, sans pour autant prendre l’avis du collège des notables qui doit se prononcer sur les candidats ou les prétendants à un trône laissé vacant. Là encore, c’est une supercherie. La singularité de notre pouvoir est celle  de  s’immiscer dans les affaires qui ne sont  pas les siennes mais qui souvent, donnent lieu à des affrontements sanglants. Parce qu’aucune personne n’acceptera qu’un sang mêlé vienne à siéger sur un trône, quand les héritiers légitimes ont encore qualité à y accéder. Et le statut des chefferies traditionnelles dont je faisais mention, dispose clairement que c’est sur avis d’un collège électoral, constitué de notables et de ceux qui sont de la lignée régnante qui proposent un successeur au ministère de l’intérieur, lequel entérine ce choix  par un décret présidentiel.  Là encore, dans le cas d’espèce, c’est de l’improvisation, encore qu’on n’en a pas mesuré les conséquences.

Nous avons perdu assez de tchadiens dans des histoires où l’Etat a posé des actes contre nature. C’est en cela que nous ne sommes pas d’accord, avec la manière de faire du président de la république. Les chefferies traditionnelles sont des pouvoirs installées depuis de siècles, et ce n’est pas aujourd’hui qu’on doit créer un nouveau prétendant à un trône,  alors qu’il n’a pas qualité. C’est une histoire de sang et on ne va pas accepter que quelqu’un qui n’est pas issu de la lignée vienne là,  juste parce que, soit il a de l’argent, soit qu’il est un militant qui a fait montre de son zèle et qu’en récompense on doit lui donner un trône. Il y a plusieurs possibilités de récompenser les militants. Hier c’était Sarh, aujourd’hui c’est Abéché et demain ça sera des royaumes installées depuis des années, je fais allusion à la chefferie du Baguirmi, le Gong de Léré, le Mbang de Bedaya…Si on n’y prend pas garde, on risque d’aller à contre-courant de notre histoire, en enlevant les prérogatives de ces entités, enseignées dans les écoles et objets de beaucoup d’ouvrages. On demande au président de la République de se ressaisir, d’éviter d’aller là. Il ne peut pas prendre une mesure à Goz-Beida pour ramener la sécurité, de force, alors qu’il en est la cause en réalité. Les querelles inter et intro communautaires ne sont pas seulement liées à la terre, mais aussi aux comportements déplorables de l’Etat, qui consiste à installer quelqu’un à une place qui n’est pas la sienne. Si gouverner c’est prévoir, je crois que la meilleure prévention est d’éviter d’aller vers des actes qui risquent de faire soulever toute une population.

L’Etat tchadien a promis d’intégrer 20 000 jeunes en 2020. Pensez-vous que le Président de la République tiendra sa parole?

Nous le souhaitons pour nos jeunes, car le chômage est un fait réel au Tchad. Mais, est-ce que le proclamer sous la forme de slogan électoral ou électoraliste, donnera effectivement la place à l’emploi des vingt mille jeunes ? Et ce, sans étude préalable alors que nous sommes dans une mesure de récession économique ! Sur quoi fonde-t-il son espoir pour prendre en charge vingt mille jeunes et leur distribuer normalement les revenus. Nous le souhaitons parce  que pour le programme politique du PRET, notre projet de société, fait une place de choix aux jeunes, aux femmes et au monde rural.

Il faut que ça ne se limite pas au slogan. Nous souhaiterons que cela soit réelle, mais nous doutons, vu la situation délétère dans laquelle nous vivons. Nous pensons que c’est encore une fois le slogan à l’Italie que les politiques ont l’habitude de prononcer. Mais les jeunes,  le moment venu, le rappelleront  à ceux qui leur ont tenu cette promesse. Quand on veut manipuler la jeunesse,  soit on la retourne contre soi-même soit on l’a à ses côtés. Nous conseillons au président de la république, qu’il ne faut pas qu’il fasse de telles promesses, alors que nous dans une situation sérieuse. Il a des techniciens dans les différents ministères qui devraient réfléchir autrement sur la question de l’emploi de jeunes. Mais nous le souhaitons de tous nos vœux.

Comment trouvez-vous l’arrivée sur la scène politique du parti Les Transformateurs ?

Ecoutez, une formation politique qui arrive  sur scène pour poursuivre le même but,  ne peut être que la bienvenue. L’opposition doit cesser de se tromper de combat et d’adversaire. Nous n’avons jamais cessé de dire,  le combat contre ce régime tentaculaire  ne pourra  se gagner seul. Il faut forcement que celle-ci mutualise ses efforts au lieu de se livrer à une guerre de tranchées entre elle-même. Il faut que cette nouvelle formation joue sa partition.  S’il y a à ce propos un problème de légalité qui s’impose, c’est la faute de l’Etat. Parce que la tendance devrait être à la régularisation plutôt qu’à  l’interdiction de fonctionner. On n’a pas compris pourquoi on est arrivé à ce point-là. Je crois que les dirigeants du parti Les Transformateurs peuvent, pour mettre terme à cette situation du non droit, s’appuyer sur les bonnes dispositions de l’Etat pour que la situation soit régularisée afin qu’ils participent aux scrutins qui arrivent. Nous ne sommes pas d’accord pour l’exclusion de Les Transformateurs et l’Etat doit mettre de l’eau dans son vin afin que la situation qui lui parait  illégale soit régularisée.

Votre mot de la fin…

Pour le mot de la fin, nous souhaiterons que ce peuple martyr qui, aujourd’hui,  ne passe pas une semaine sans pleurer un de ses membres dans des conflits inter et intra-communautaires, qui jette entre eux,  les agriculteurs-éleveurs, les agriculteurs-agriculteurs  et les éleveurs entre eux, des fois par des situations créées par les comportements ubuesques de l’Etat. Car un régime, ça passe mais le peuple tchadien va demeurer éternellement.

Propose recueillis par Allafi A. Nganansou

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