Mali: l’ancien président Moussa Traoré est décédé

L’ancien chef de l’État malien, Moussa Traoré, est décédé à la mi-journée, ce mardi 15 septembre, à Bamako, apprend-on de sources concordantes. Au pouvoir de 1968 à 1991, il était âgé de 83 ans.

L’histoire d’un régime qui a mal tourné

Le 19 novembre 1968, Moussa Traoré participe au coup d’État qui renverse le président socialiste Modibo Keïta. Il devient président du Comité Militaire de Libération Nationale, puis président de la République le 19 septembre 1969.

Toutes les activités politiques sont alors interdites. Un régime policier est mis en place sous la direction du colonel Tiécoro Bagayoko. Des agents de renseignements vont dans les écoles pour écouter les cours des professeurs (le milieu scolaire et universitaire est en majorité hostile au régime militaire). Le socialisme économique de l’ancien président Modibo Keïta est abandonné.

Le 2 juin 1974, il fait adopter par référendum (99 % des voix) une constitution qui fonde la Seconde République, imposant un parti unique, une assemblée nationale et un président élu tous les 5 ans au suffrage universel.

En 1976, il fonde l’Union Démocratique du Peuple Malien (UDPM), parti unique, ainsi que l’Union nationale des femmes du Mali et l’Union nationale des jeunes du Mali, organisations auxquelles respectivement toutes les femmes et tous les jeunes doivent alors adhérer.

Le 16 mai 1977, l’ancien président Modibo Keïta meurt de façon suspecte en détention à l’âge de 62 ans, entraînant une forte mobilisation populaire : des milliers de personnes se rendent à ses obsèques, auxquelles participent également des délégations officielles de pays voisins (notamment Guinée et Côte d’Ivoire). Le régime militaire réagit violemment en procédant à de nombreuses arrestations, mais Moussa Traoré est obligé d’expliquer à Radio-Mali les raisons de la mort de Modibo Keita, due selon lui à « un œdème aigu des poumons », mais ces explications ne convainquent personne.

Lors des premières élections de la seconde république en 1979, Moussa Traoré est l’unique candidat à la présidentielle.

Il propose d’aller vers une ouverture politique ce qui lui permet d’acquérir le soutien de certains intellectuels comme Alpha Oumar Konaré qui acceptera le poste de ministre des Arts et de la Culture pendant quelques années.

En 1980, des manifestations étudiantes sont réprimées. Leur chef Abdoul Karim Camara, dit « Cabral », décède sous la torture, le 17 mars 1980.

En 1982, il est promu général d’armée.

Le 22 mars 1991, une manifestation à Bamako composée de milliers d’étudiants est réprimée par les armes, faisant une centaine de morts. Le 26 mars 1991, un coup d’État militaire mené par le lieutenant-colonel Amadou Toumani Touré renverse Moussa Traoré. Le Comité de Transition pour le Salut du Peuple est mis en place avec le colonel Touré à sa tête.

D’abord condamné à mort puis emprisonné à vie

Moussa Traoré est emprisonné à la prison de Markala. En février 1993, il est condamné à la peine de mort pour crimes de sang commis entre janvier et mars 1991 par un tribunal de Bamako. Il est incarcéré ainsi que tous les membres de sa famille, dont son petit-fils de 6 ans qui a purgé une peine de 14 mois.

Il est le premier chef d’État africain à devoir répondre de ses actes devant la justice de son pays. Ayant été condamné à mort, ainsi que son épouse Mariam, Moussa Traoré est déchu de ses droits civiques, et ne peut donc pas voter. Il considère cependant avoir été condamné pour des crimes qu’il n’a pas commis, et avoir été la victime d’un complot politique. Pour lui, le massacre du 26 mars 1991 a été orchestré par l’opposition politique et les socialistes français qui auraient fait venir des mercenaires au Mali afin de le déstabiliser.

Libération en 2002

Le président Alpha Oumar Konaré commue sa peine en prison à vie le 21 septembre 1999 puis, en mai 2002, le gracie. En revanche, il doit dorénavant répondre de crimes économiques, pour lesquels il est aujourd’hui condamné. Il est accusé d’avoir détourné pendant son règne plus de 2 milliards de dollars d’argent public.

Après sa libération, Moussa Traoré vivait dans une grande villa du quartier Djikoroni-Para à Bamako offerte par le gouvernement malien avant son décès ce mardi 15 septembre 2020.

Malgré ces douloureux souvenirs, il était très écouté de la classe politique malienne ces dernières années.

Actucameroun

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